mercredi, 29 avril 2020
Migrant-e-s et réfugié-e-s expulsé-e-s au Niger malgré la crise de la Corona et bloqués dans les camps de l'OIM. Des protestations déclenchées par des conditions insupportables.

Alors que les frontières entre les États africains sont fermées en raison de la crise de Corona, les expulsions et les refoulements se poursuivent et des milliers de migrant-e-s et de réfugié-e-s sont bloqué-e-s dans des pays de transit comme le Niger. Des protestations se manifestent alors que les gens se plaignent des mauvaises conditions de vie à l'intérieur des camps et de la mauvaise gestion de l'OIM.

 

Avec la crise de Corona, de nombreuses frontières entre pays africains ont été fermées pour des voyageurs, entre autres les frontières de l'Algérie et de la Libye avec le Niger. La crise menace non seulement la santé, mais aussi les moyens d'existence de nombreuses personnes qui vivent déjà dans des conditions précaires.

En même temps, l'Algérie et aussi la Libye maintiennent leur politique d'expulsions, au moins partiellement, malgré la crise de Corona et des milliers de migrant-e-s et réfugié-e-s sont présentement bloqué-e-s dans des pays de transit, comme le Niger, dans des conditions insupportables.

Selon un rapport du journaliste Sofian Philip Nacer, une centaine de personnes étaient expulsées de l'est de la Libye vers le Soudan fin mars. Au cours de la première moitié du mois d'avril, les autorités libyennes de l'est ont renvoyé au moins 236 personnes au Soudan, au Mali, en Somalie, au Nigeria et au Ghana.

 Les refoulements et expulsions de l'Algérie vers le Niger ont continué aussi malgré la ferméture de la frontière entre les deux pays. Le Nigéria, de sa part, est aussi en train de refouler des citoyen-ne-s du Niger qui vivaient sur son territoire.

 

 

Assamaka: Refoulements et quarantaine en désert

Selon le chef d’équipe des lanceurs d'alerte d’Alarme Phone Sahara (APS) à Assamaka, entre le 12 et le 14 avril 2020, 302 migrant-e-s sont arrivés à Assamaka. Parmi eux, il y a des femmes et des hommes et tou-te-s de citoyen-ne-s du Niger, sauf un citoyen de Guinée Conakry.

Toutes ces personnes ont été mises en quarantaine de 14 jours dans le hangar de l'OIM à la base des règlements de prévention contre la propagation du Corona virus. Les chiffres correspondent aussi avec les déclarations de l'OIM, selon laquelle 418 personnes en totalité se trouvaient en quarantaine à Assamaka le 16 Avril.

Hangar de l'OIM à Assamaka (photo prise avant la crise de Corona)

Le bureau des Médécins Sans Frontières a expliqué que ces gens confiné-e-s ne soient pas des expulsé-e-s, mais des travailleurs en route de retour. Néamoins, les lanceurs d'alerte d'Alarme Phone Sahara supposent qu'ils ont en réalité été expulsé-e-s d'Algérie. Depuis un certain temps déjà, les forces de sécurité algériennes ont pour pratique courante, lorsqu'elles expulsent des personnes vers le Niger, de ne pas organiser seulement des convois d'expulsion officiellement déclarés aux autorités du Niger, mais d'abandonner aussi de nombreuses personnes expulsées à titre non-officiel au "Point Zéro", dans la zone frontalière. Les gens doivent ensuite se rendre à pied à travers le désert jusqu'au poste frontière d'Assamaka. Selon les lanceurs d'alerte d'Alarme Phone Sahara, c'est cette sorte d'expulsion non-déclarée que les gens présentement confiné-e-s au hangar de l'OIM à Assamaka ont subi.

Alarme Phone Sahara dénonce aussi les conditions dans lesquelles les personnes expulsées d'Algérie sont gardées en quarantaine de deux semaines: Assamaka est une petite ville en plein désert. Le hangar de l'OIM et les capacités des soins médicaux sur place ne sont pas suffisantes pour une prise en charge appropriée de centaines de personnes souvent blessées, malades et psychologiquement traumatisées après les expériences douloureuses et violentes pendant l'expulsion.

 

 

Blocage dans les camps d'OIM, des prostetations en face d'une frustration croissante

Des centaines de migrant-e-s et réfugié-e-s sont présentement bloqué-e-s au centre de transit de l'OIM à Arlit et aussi dans les camps de l'OIM et de l'HCR à Agadez et dans les environs. Dans plusieurs endroits, des gens ont commencé à protester en face d'une frustration croissante: 

 

Arlit

A Arlit, où près de 640 personnes selon les chiffres de l'OIM, surtout des migrant-e-s refoulé-e-s de l'Algérie, ont été placé-e-s, les gens ont protesté et revolté contre les conditions insupportables le 20 Avril.

©Fatma Ben Hamad, "Obesrvateurs France 24"

Selon l'un des migrant-e-s interviewé par la journaliste Fatma Ben Hamad pour "Obesrvateurs France 24", leur proteste et révolte était due à l’absence de dialogue avec les responsables de l’OIM, qui gèrent le camp d’Arlit.

Dans la situation où ils sont, les gens souhaitent maintenant de rentrer dans leurs pays, entre autres le Mali, le Nigéria, la Guinée Conakry, le Bénin et le Cameroun, mais ces pays, de leur part, ont fermé leurs frontières pendant la crise de Corona. L'OIM, de sa part, déclare qu'il n'ait pas la possibilité de faciliter la rentrée des migrant-e-s bloqué-e-s au Niger à ce moment, mais des migrant-e-s au camp d'Arlit soulignent que depuis leur arrivée, aucune personne responsable de l'OIM soit venu pour dialoguer avec eux et leur situation reste intransparente dans le flou.

Selon l'homme interviewé par "Observateurs France 24", les conditions de vie au camp de l'OIM sont aussi insupportables: A leur arrivée d’Assamaka, les migrant-e-s n’avaient pas d’eau potable ni de matelas et bénéficiaient de seulement quatre tentes pour plus de 900 personnes. En plus, ils n'avaient pas reçu des kits d'hygiène avec des savons et des serviettes, une raison pourquoi des gens indigné-e-s ont forcé les portes des magasins de l'OIM pendant leur révolte pour se ravitailler des denrées nécessaires.

Selon "Obesrvateurs France 24", la police réagissait avec la répression: Du gaz lacrymogène était tiré sur les migrant-e-s, au moins 13 personnes étaient arrêtées et emmenées au poste de police, où elles étaient encore le 24 Avril.

 

Témoignage de Galius Moumouni Efouad, actuellement au centre de transit de l'OIM à Arlit, Niger

 

Agadez

Un groupe de migrant-e-s du Mali, selon leur propre déclaration 276 personnes, qui étaient expulsé-e-s de l'Algérie au Niger le 4 Mars 2020 et qui sont présentement au Centre de Transit de l'OIM à Agadez, se sont adressé-e-s au peuple, aux autorités et au président du Mali dans une déclaration vidéo. Ils se plaignent du fait que jusqu'à maintenant, ils n'ont trouvé aucune solution pour leur retour au pays et ils soulignent qu'ils soient trés inquièt-e-s vu la situation sanitaire au Niger. Donc ils demandent urgemment de les aider à rentrer au Mali. 

256 migrant-e-s, selon les chiffres de l'OIM, qui étaient ramené-e-s de la frontière Libyenne à Agadez début Avril 2020, étaient confiné-e-s au Stade régional Sidi Mohamed d’Agadez pendant deux semaines. Les lanceurs d'alerte d'Alarme Phone Sahara rapportent que ces gens étaient d'abord refusé l'accès en Libye par des forces libyennes, avant d'être intercepté-e-s par les forces de sécurité nigériennes et emmené-e-s jusqu'à Agadez. Selon Aïr Info Agadez, le 10 avril 2020 quarante trois parmis ces personnes ont fui le stade, ce qui donne une forte impression que leur confinement se déroulait dans des conditions de manque de transparance et manque de respect de leurs droits.

 

 

Dan Issa, frontière nigero-nigerianne

En plusieurs reprises, des citoyen-ne-s du Niger retourné-e-s du Nigéria, parmi eux aussi des gens refoulé-e-s par force, sont arrivées à Dan Issa à la frontière entre le Niger et le Nigéria.

Selon Tiémogo Amadou de l'Agence Nigérienne de la Presse à Maradi, un premier group de 103 personnes, composée de femmes, d'hommes et d’enfants, est arrivée le 22 avril 2020 et les jours après, d'autres 148 nigérien-ne-s venus des états fédérés de Kano, de Katsina,  de Lagos et de la République du Cameroun s'y sont ajouté-e-s. Toutes ces personnes ont été mises en quarantaine à Dan Issa pour la prévention de Corona, avant d'avoir la possibilité de rejoindre leurs différentes communautés.

Ce cas montre que la crise de Corona aggrave aussi la situation de beaucoup de personnes qui sont en migration pas vers l'Europe, mais entre les pays de l'Afrique subsaharienne pour gagner leur vie.

 

 

Liberté de circulation et droit à la bonne santé pour tous et pout toutes - aussi aux temps de Corona!

Pendant que les expulsions et refoulements continuent, des milliers de migrant-e-s et réfugié-e-s expulsé-e-s ou stoppé-e-s en cours de route restent présentement bloqué-e-s au Niger. Bloqué-e-s dans des camps en conditions de vie insupportables où leur santé est en danger, sans une perspective pour arriver à un endroit qui leur permet une vie en dignité - et maintenant même privé-e-s de la possibilité de rentrer dans leurs pays. 

La situation déplorable des migrant-e-s et réfugié-e-s piégé-e-s maintenant au Niger et dans d'autres pays de l'Afrique est un résultat directe de la politique migratoire des pays européens qui ne laissent pas seulement mourrir des migrant-e-s et réfugié-e-s dans la Méditerranée, mais qui cherchent aussi à externaliser leurs frontières sur le continent africain depuis des années. Des milliards d'Euros étaient investis dans les pays du Maghreb et au Niger pour stopper des migrant-e-s et réfugié-e-s en cours de route et pour les forcer à rentrer dans leurs pays d'origine. Dans les temps de Corona, cette politique de ferméture des routes et des frontières se transforme en piège pour des milliers de gens.

 

Alarme Phone Sahara s'oppose fortément contre une situation où des migrant-e-s et réfugié-e-s restent confiné-e-s, bloqué-e et "oublié-e-s" dans des camps, dans les zones de non-droit, exposé-e-s aux risques d'infection plus que ailleurs et privé-e-s de leur liberté et leurs droits.

Dans ce sens, Alarme Phone Sahara dénonce aussi la malgestion évidente de la part de l'OIM, une organisation internationale qui dispose de ressources financières considérables, mais n'arrive pas à héberger des migrant-e-s et réfugié-e-s bloqué-e-s au Niger dans des conditions de dignité, de transparence et de respect de leurs droits.

Alarme Phone Sahara est solidaire avec toutes les personnes qui résistent pour leur droit de santé, leur droit de liberté, leur droit de vie.

 

 

Face à cette situation, Alarme Phone Sahara demande à  l'OIM et aux autorités du Niger:

 

  • Pas du confinement de réfugié-e-s et migrantes dans des camps en désert, pas du confinement dans des conditions intransparentes et insupportable.
  • Hébergement de tou-te-s les réfugié-e-s et migrant-e-s sur le territoire du Niger dans des conditions dignes qui respectent leurs droits, leur liberté et aussi la protection de leur santé contre les risques imposés par Corona virus.
  • Une communication claire et transparente concernant toutes mesures de prévention contre le Corona virus et concernant la possibilité de retour des gens dans leurs pays d'origine.
  • De prendre toute mesure possible pour faciliter le retour des migrant-e-s et réfugié-e-s bloqué-e-s sur le territoire du Niger dans leurs pays d'origine pour ceux qui veulent rentrer de leur propre gré.
  • De ne pas intercepter des personnes par force qui cherchent à continuer leur voyage.

 

 

Alarme Phone Sahara demande aux autorités de l'Algérie, de la Libye et du Nigéria:

 

  • D'arrêter immédiatement toute sorte de raffles, de refoulements et d'expulsions de migrant-e-s et réfugié-e-s.
  • De respecter la vie et les droits de tou-te-s les migrant-e-s et réfugié-e-s sur leur territoire et de les laisser vivre dans des conditions dignes qui leur permettent aussi de protéger leur santé contre le Corona virus.

 

 

Alarme Phone Sahara demande aux autorités des états de l'Europe:

 

  • Toutes les mesures de ferméture et d'externalisation des frontières doivent être arrêtées face à la crise de Corona.
  • Au lieu de ça, les états européens doivent investir immédiatement dans des mesures pour créer des conditions de vie dignes pour tou-te-s les migrant-e-s et réfugié-e-s présentement bloqué-e-s en cours de route dans les pays de l'Afrique et pour protéger leur santé contre le Corona virus.
  • Face à la crise humanitaire qui s'aggrave avec la pandémie de Corona, les états européens doivent activement aider à évacuer des réfugié-e-s et migrant-e-s bloqué-e-s dans les camps gérés par l'OIM, par l'HCR et par d'autres acteurs et faciliter leur arrivé dans un endroit où ils peuvent vivre en sécurité et en dignité. Soit ça de rentrer dans leurs pays pour ceux qui le souhaitent, soit ça de se rendre dans un pays de leur choix, tout en respectant le droit à la libre circulation des personnes.