Février 2021 restera pour longtemps une période de souvenirs amers en termes de libre circulation de personnes. La route migratoire Agadez-frontière libyenne vient de plonger les migrants dans un état de grande tristesse et de désolation. Cela rappelle aux défenseurs du ‘’Frontex’’ la rudesse de leur décision. Aux disparitions et à la mort de dizaines de vies humaines, s’ajoute le deuil en ce mois de bilan lourd.
!!!AVIS DE RECHERCHE!!!
Dans un état de grand désespoir, Diallo Mamadou Maky, ressortissant de la Guinée Conakry, lance un cri de détresse :
« Je voyage en contact permanent avec mes compatriotes depuis notre départ du pays. J’ai voyagé dans un véhicule différent que celui emprunté par mes frères et camarades. Mais nous nous échangions nos positions jusqu’au jour où j’ai égaré mon téléphone. Alors, que notre embarcation est en avance sur la leur dans le désert nigérien, je communique pour la dernière fois avec eux alors qu’ils se trouvaient dans la localité de Dirkou. En ce moment j’étais relativement proche de la frontière de Libye. Dès lors, je n’ai plus leur contact. Je décide alors de rebrousser chemin pour connaitre le sort de mes compagnons à partir du 02 février 2021. Voilà la raison pour laquelle je sollicite votre aide pour m’aider à m’enquérir de la situation de mes 04 compagnons de route ».
Ils sont 04 jeunes gens tous originaires de la Guinée Conakry. Leur dernière escale est la localité de Dirkou au Niger en date du 02 février 2021. Depuis lors, c’est le ‘’silence radio’’. Où pourraient se trouver Mamadou Hadi Diallo, Mamadou Bailo, Mamadou Wouri et Ibrahim Diallo. Nous appellons à la bonne volonté de ceux et celles qui auraient de leurs nouvelles de les partager avec nous par le canal du réseau APS. Tel est le vœu ardent du jeune Maky qui a renoncé à la traversée du désert pour engager une recherche de ses co-voyageurs.
22 autres personnes portées disparues
A seulement cinq jours d’intervalle, il est rapporté la disparition de plus de 20 personnes sur le même axe, la route de malheur menant d’Agadez à la frontière libyenne. Ils seraient 25 passagers à embarquer sur un véhicule. Au milieu de nulle part, le conducteur du véhicule les aurait déposés pour ne plus revenir. Dans la débandade, 3 arrivent à marcher jusqu’à croiser un camion de charbonniers. C’est grâce à cette rencontre que ces rescapés ont eu la vie sauve et se retrouver dans la cité d’Agadez et raconter cette triste mésaventure.
D’aucuns se demanderaient pourquoi tant de risques sont pris. Par le passé, les désorientations et les disparitions de voyageurs étaient réduites pour une raison toute simple. Tous les transporteurs empruntaient la même voie et se déplaçaient en convoi sous escorte des forces de défense et de sécurité jusqu’à Dirkou. De là, ceux qui roulent en direction de la Libye passent par des villages et observent des arrêts à leur convenance. Depuis l’avènement, de la loi 2015-036 en vigueur au Niger, les transporteurs bravent les routes en solitaire en empruntant des routes dangereuses pour éviter les nombreux postes de contrôle et patrouilles déployés dans le désert. La nouvelle vague des transporteurs engagés sur de nouveaux itinéraires du désert depuis la reconversion des anciens ne se fient qu’à leurs appareils GPS qui sont aussi de sources d’ennuis au cas où ils croiseraient les bandits et autres trafiquants rivalisant les mêmes reliefs. La mésaventure du 07 février 2021, serait attribuée à un conducteur nommé « Z » qui ne serait pas à son premier forfait de sources dignes de foi. Après une quinzaine de jours dans le désert et en cette période d’hiver glacial, quelle qu’en soit les recherches à entreprendre, il y aurait très peu de chance de trouver ces 22 personnes en vie.
Il n’y a pas que de disparitions en ce mois de février 2021 comme drame
C’est contre toute attente que le nommé Mamadou Baldé âgé de 26 ans, sénégalais de nationalité de retour de la Libye se plaint de malaise du fait des adversités de la route empruntée pour arriver à Agadez dans l’intention de retourner dans son pays d’origine après un séjour assez fructueux en terre libyenne. Son frère l’accompagne au centre de soins où il fut admis en urgence le mercredi 17 février 2021. Sa mort survint aux environs de 22 heures 30 minutes. Après les formalités, la communauté des migrants à Agadez l’accompagne à sa dernière demeure. Seul un représentant d’APS aurait marqué de sa présence à cette cérémonie bien que d’autres organisations dites « humanitaires » aient eu vent de cette tragédie sans avoir montré leur compassion. Cela pourrait peut-être se comprendre dans un contexte de pandémie du corona virus.
La loi 2015-036 frappe les migrants de plein fouet
L’une des dispositions de la loi référée ci-haut met en garde toute personne reconnue coupable de trafic de personnes et renforce la chaîne pénale pour améliorer le traitement judiciaire. C’est dans cette optique que le fonds fiduciaire d’urgence (FFU) de l’union européenne (UE) participe au contrôle des frontières à travers la formation d’agents, la construction de postes-frontières, etc. Selon la Cimade dans sa note d’analyse (2020, p.13), « ces projets sont associés à la lutte contre le terrorisme au Sahel car ils mobilisent les mêmes instruments et les mêmes forces de sécurité. Cet amalgame renforce l’approche sécuritaire des migrations ». Ce qui est advenu en fin de la première semaine de février 2021 serait dans cette logique. Puisque, pas moins de huit (8) personnes issues de la communauté de migrants croupissent dans la maison d’arrêt d’Agadez et les investigations sur leur cas se poursuivent.
Bloquer les personnes sur les routes de la migration et les renvoyer dans leur pays d’origine
Si le montant de 4479000 € sont affectés pour la mise en œuvre du FFU, il aurait été judicieux voire salutaire d’inclure la protection juridique de personnes pouvant être confrontées aux effets de mesures sécuritaires comme celles qui prévalent dans les pays du Sahel. Là où le bât blesse, c’est que le FFU ne soutient aucun projet de protection juridique des migrants dans les pays du G5 Sahel en dehors des programmes spécifiques du Haut-Commissariat aux Réfugiés (HCR) d’assistances aux personnes déplacées et demandeuses d’asile. Le concept « protection » en vogue pour certaines organisations humanitaires aurait été plus profitable aux bénéficiaires du FFU s’il incluait la prise en charge en termes de protection juridique des personnes bloquées le long des routes migratoires pour un certain nombre de facteurs contextuels comme ce qui prévaut à Agadez au Niger.
La migration et son corollaire de désarroi ne cesseraient d’affecter de nombreuses familles tant que l’égocentrisme des leaders du Sud et du Nord ne serait pas remplacé par le bon sens prônant la paix, le droit, l’égalité et la justice sociale.