dimanche, 04 décembre 2022
Niger fin 2022: Urgence humanitaire en face d’expulsions massives et inaccessibilité aux services de l‘OIM

Les expulsions d’Algérie au Niger continuent à grande échelle, avec 5181 personnes espulsées entre 29 Octobre et 04 Décembre 2022 selon les observations d’Alarme Phone Sahara. Ces expulsions se sont passées dans des conditions chaotiques et même mortelles avec au moins un cas de décès rapporté selon les Lanceurs d’Alerte d’Alarme Phone Sahara à Assamaka, frontière algéro-nigérienne.

En même temps, Alarme Phone Sahara observe que des milliers des migrant.e.s au Niger, entre autres des personnes expulsées nouvèlement arrivées, ne trouvent plus d’accès aux services de  l’Organisation Internationale des Migrations (OIM). Des sources nigériennes rapportent même que l’OIM ait annoncé de suspendre ses services au Niger à partir de fin Novembre 2022 pour une période de 1 à 3 mois. Cette situation risque à provoquer une crise humanitaire pour la population migrante au Niger faute d'autres alternatives.

 

 

Arrivée de personnes expulsées à Assamaka, 3 Novembre 2022

 

Convois d’expulsion d’Algérie au Niger entre fin Octobre et fin Novembre 2022

Entre le 29 Octobre 2022 et le 04 Déembre 2022, au moins 5181 personnes de divers pays ont été expulsé.e.s d’Algérie au Niger. Le nombre de personnes expulsé.e.s depuis début 2022 monte alors à au moins 24250.

 

29 Octobre 2022: Arrivée d‘un convoi d'expulsion officiel à Assamaka, frontière algéro-nigérienne. Selon les Lanceurs d’Alerte d’Alarme Phone Sahara, 1124 personnes étaient embarquées dans le convoi depuis l’Algérie, mais seulement 818 étaient enregistrées à l’arrivée à Assamaka. Il n’est pas clair qu’est-ce que les autres 306 personnes sont devenues ou à quel moment et dans quelles conditions elles aient quitté le convoi.

Parmi les 818 enregistré.e.s au Niger, dont 3 femmes, 4 garcons mineurs, une fille mineure et 810 hommes, il y avait 746 Nigérien.ne.s, tou.te.s les autres, ce qui est inhabituel pour un convoi officiel, des ressortissant.e.s d’autres pays: 40 ressortissant.e.s du Tchad, 20 du Soudan, 3 de la Côte d’Ivoire, 3 du Mali, 2 du Nigéria, 2 de la Guinée Conakry, une personne du Sénégal et une de la Centrafrique.

 

1ier Novembre 2022: 634 personnes expulsées dans un convoi d'expulsion non-officiel, parmi eux 13 femmes, 6 filles mineures, 8 garcons mineurs, et 607 hommes, ont été déposé.e.s au „Point Zéro“ pour marcher jusqu‘à à Assamaka à pied.

Les plus grands groupes d'expulsé.e.s étaient encore une fois 135 Guinéen.ne.s et 229 Malien.ne.s. Apart eux il y avaient 44 ressortissant.e.s du Soudan, 39 du Bénin, 41 du Burkina Faso, 16 du Caméroun, 21 de la Côte d'Ivoire, 29 du Sénégal, 19 du Tchad, 29 de la Gambie, 9 de la Sierra Léone, 2 du Niger, 7 du Libéria, 4 du Togo, 5 du Ghana, une de l’Éthiopie et une de la Guinée Bissau.

 

03 Novembre 2022: Arrivée d‘un convoi d'expulsion officiel avec 840 personnes, y compris 37 femmes, 30 filles mineures, 139 garcons mineurs et 625 hommes. Parmi les expulsé.e.s étaient 831 citoyen.ne.s nigérien.ne.s et 9 ressortissant.e.s d’autres pays: 6 du Mali, une personne ivoirienne, une du Soudan et une du Burkina Faso.

Arrivée de personnes expulsées à Assamaka, 3 Novembre 2022

Tragiquement, selon les Lanceurs d’Alerte d’Alarme Phone Sahara, une personne est décédée dans ce convoi d’expulsion. On ne dispose pas encore de plus amples informations sur l'identité et l'origine de la personne défunte, ni sur les circonstances exactes de son décès.

Alarme Phone condamne fermement les expulsions violentes et inhumaines de l'Algérie vers le Niger, qui, dans ce cas, ont entraîné la mort d'un être humain! Nous demandons que les circonstances de la mort de cette personne soient éclaircies et que les responsables soient tenus de rendre des comptes !

 

16 Novembre 2022: 525 personnes expulsées dans un convoi d'expulsion non-officiel, parmi 6 femmes, 19 garcons mineurs, une fille mineure et 499 hommes, ont été déposé.e.s au „Point Zéro“ pour marcher jusqu‘à à Assamaka à pied.

Les plus grands groupes d'expulsé.e.s étaient encore une fois 130 Guinéen.ne.s et 181 Malien.ne.s.

Apart eux il y avaient 16 ressortissant.e.s du Bénin, 29 du Burkina Faso, 30 du Caméroun, 27 de la Côte d'Ivoire, 26 du Soudan, 14 du Sénégal, 4 du Nigeria, 20 de la Sierra Léone, 13 du Tchad, 4 du Niger, 19 de la Gambie et un Togolais. En plus 6 ressortissants du Yémen, 2 de la Syrie et 2 de l’Égypte qui ont été refusés l’accès au territoire nigérien au motif qu'ils ne sont pas des citoyen d'un état membre de la CEDEAO.

 

18.11.2022: Arrivée d‘un convoi d'expulsion officiel avec 879 personnes, y compris 67 femmes, 52 filles mineures, 54 garcons mineurs et 706 hommes.

Parmi les expulsé.e.s étaient 865 citoyen.ne.s nigérien.ne.s et 14 ressortissant.e.s d’autres pays: 9 personnes du Soudan, 2 du Burkina Faso, une personne du Sénégal, une du Tchad et une du Bénin.

 

Comme plusieurs fois avant, l’équippe d’Alarme Phone Sahara à Assamaka a aidé à transporter les personnes malades et blessées parmi les expulsé.e.s au dispensaire locale:

 

 

02 Décembre 2022: 656 personnes expulsées dans un convoi d'expulsion non-officiel, parmi eux 11 femmes, 24 garcons mineurs, 11 filles mineures et 610 hommes, ont été déposé.e.s au „Point Zéro“ pour marcher jusqu‘à à Assamaka à pied.

Les plus grands groupes d'expulsé.e.s étaient encore une fois 210 Guinéen.ne.s et 312 Malien.ne.s.

Apart eux il y avaient 6 ressortissant.e.s du Bénin, 26 du Burkina Faso, 14 du Caméroun, 16 de la Côte d'Ivoire, 11 du Soudan, 15 du Sénégal, 6 du Nigeria, 16 de la Sierra Léone, 2 du Tchad, 11 de la Gambie, 2 de la Guinée Bissau, 3 du Libéria et 2 de la Mauritanie. En plus 4 ressortissants du Yémen qui ont été renvoyés en Algérie au motif qu'ils ne sont pas des citoyens d'un état membre de la CEDEAO.

 

04 Décembre 2022: Arrivée d‘un convoi d'expulsion officiel avec 523 personnes, y compris 90 femmes, 79 filles mineures, 43 garcons mineurs et 311 hommes.

Parmi les expulsé.e.s étaient 502 citoyen.ne.s nigérien.ne.s et 21 ressortissant.e.s d’autres pays: 16 personnes du Nigéria, 2 du Bénin, une personne du Sénégal, une du Mali et une du Ghana.

 

Inaccessibilité des services de l’OIM au Niger – création d’une crise humanitaire

Les équippes d‘Alarme Phone Sahara observent que des milliers des migrant.e.s au Niger restent exclu.e.s des services de  l’OIM et des sources nigériennes rapportent même que l’OIM ait annoncé de suspendre ses services au Niger, notemment l’accueil, le profilage, l’hébergement et le transport de migrant.e.s, pour une période de 1 à 3 mois à partir de fin Novembre 2022.

De nombreux migrants au Niger dépendent de l'hébergement et des soins de l'OIM et il n'existe actuellement aucun autre acteur disposant de moyens et de ressources comparables. Si tous ces services sont maintenant suspendus sans remplacement adéquat, à un moment où il y a des milliers de migrant.e.s bloqué.e.s au Niger à mains vides, une véritable crise humanitaire menace d'en être la conséquence inévitable.

 

Centre d'accueil de l'OIM à Agadez

En particulier à Assamaka, à la frontière algéro-nigérienne, où arrivent chaque mois des milliers de personnes expulsées d'Algérie, dont une grande partie était jusqu'à présent hébergée et soignée, du moins sommairement, dans le centre d'accueil de l'OIM, une coupure des services de l‘OIM pendant des mois aurait des conséquences catastrophiques pour les personnes concernées..

Selon les observations d’Alarme Phone Sahara, il y a déjà pour l’instant une faible assistance en termes de transport d’Assamaka vers Agadez à cause de la situation précaire à la fois pour la population autochtone et migrante.

 

D'autres conséquences encore plus graves sont à craindre pour les mois à venir, selon la coordination d'Alarme Phone Sahara à Agadez:

La période de Décembre 2022 à février 2023 est une période où la température est très basse dans le désert. Dormir sans abri expose la vie des migrants au froid d’où la nécessité de chercher des abris à ces personnes. Le nombre de personnes va croitre tant que des voyages ne sont pas organisés au profit des personnes qui le désirent. La précarité ambiante rendra les migrants plus vulnérables à la sous-alimentation et aux maladies. Laissées à elles-mêmes à des endroits peu sécurisés, il y a des risques pour certaines d’entre elles de tenter l’impossible en marchant dans le désert au péril de leur vie pour tenter de retourner en Algérie. La menace la plus pesante sur ces personnes est leur vulnérabilité qui peut les conduire à des vols de bétail et à la mendicité pour survivre puisque leurs compétences professionnelles et techniques sont sous-valorisées sur le marché de l’emploi.   

 

 

OIM au Niger: Histoire d’une malgestion continuée

A plusieurs reprises ces derniers mois, l’OIM au Niger était ciblée de protestations de migrant.e.s qui ont exprimé leur mécontentement profond avec les mauvaises conditions de vie aux camps de l’OIM au Niger et contre la mauvaise et peu fiable mise en œuvre des programmes de l‘OIM de soi-disant "retour volontaire".

Pour ces raisons, le 19 Septembre 2022, des migrant.e.s Sénégalais.e.s ont commencé une marche à pied d‘Agadez  vers Niamey.

Le 27 et 28 Août 2022, il y avait des manifestations de migrant.e.s autour les camps de transit de l’OIM à Arlit et à Agadez. Entre autres, un group de malien.ne.s s’était adressé à la société civile malienne et au gouvernement de transition du Mali avec une déclaration vidéo pour demander de l’aide pour rentrer au pays.

Plusieurs fois, il y avait des protestations dans les camps de l’OIM à Agadez et à Arlit déjà pendant les dernières années.

Si des milliers de migrant.e.s démunie.e.s ne trouvent plus d’accès aux services de l’OIM au Niger, sans qu'il n'existe d'autres structures en mesure de les remplacer, l'OIM les place dans des situations de détresse aiguë et, dans le pire des cas, de danger de mort.

 

L’OIM, un maillon dans la chaîne du régime frontalier

C‘est l’OIM qui s’est donné le mandat de gérer les programmes des retours dits „volontaires“ aux pays d'origine des migrant.e.s, y compris leur prise en charge dans ses camps jusqu’au retour. Selon les directives de l'OIM, les personnes sont hébergées et nourries si elles acceptent le retour dit "volontaire. Avec ce rôle, l'OIM est un maillon important de la chaîne du système de l’externalisation des frontières et du contrôle migratoire mis en place sur le sol africain sous l’influence des pays de l’Union Européenne.

Les derniers développements montrent avec insistance que l’OIM, malgré les budgets considérables qu’elle recoit, n’est pas prête ou pas capable de rassurer au moins des conditions de vie dignes et une gestion fiable et responsable pour les personnes dont elle s’est donné le mandat de leur prise en charge.

 

Alarme Phone Sahara met en garde de toute urgence contre les graves conséquences pour des milliers de migrants au Niger, qui risquent de se retrouver dans une situation de détresse aiguë si ces personnes restent exclues des services de l'OIM!

 

 

Alarme Phone Sahara demande de l’OIM et ses bailleurs de fonds:

  • Non à toute sorte de suspension des services de l’OIM et à l’exclusion de personnes en besoins urgents! Non à la création de la détresse pour des milliers de migrant.e.s!
  • La continuation de l’accueil, de l’hébergement et du transport pour tou.te.s les migrant.e.s qui en ont besoin doivent être garanties!
  • Si l’OIM veut se retirer du Niger, les services pour les migrant.e.s et les moyens nécessaires pour les maintenir doivent être mis dans les mains de structures locales, avec du temps suffisant de préparation! 
  • Fournir des ressources suffisantes pour permettre des conditions de vie décentes à tou.te.s les migrant.e.s et réfugié.e.s qui ont besoin d'assistance au Niger.
  • L'hébergement et la prise en charge ne doivent pas dépendre de la soumission à un soi-disant "retour volontaire" !
  • Au lieu de mettre des millions d’Euros pour fermer les frontières et empêcher la migration par force, il faut respecter la liberté de circulation des personnes et investir dans le sauvetage de vies sur les trajets de migration et la création de routes de voyage sécurisées pour tout le monde!