mardi, 22 mars 2022
Mars 2022: Arrivée d'autres convois d'expulsion. Situation précaire à Assamaka et dans les villes du Niger

Le 20 et 22 Mars 2022, au moins 1693 personnes ont été expulsé.e.s d'Algérie au Niger. Le nombre de personnes expulsé.e.s depuis début 2022 monte alors à au moins 5069. En même temps, les équipes d'Alarme Phone Sahara raportent d'une situation de plus en plus précaire à Assamaka et dans les villes du nord du Niger pour des milliers de personnes expulsées qui ne sont pas ou pas suffisemment prises en charge dans les camps de l'OIM.

Des citoyen.ne.s du Niger expulsé.e.s arrivent à Agadez, 10 Mars 2022

©Alarme Phone Sahara

 

Convoi d'expulsion non-officiel du 20 Mars 2022

Le 20 Mars 2022, 582 personnes expulsées dans un convoi d'expulsion non-officiel, parmi eux 5 femmes, 2 filles mineures et 575 hommes, sont arrivées à Assamaka à la frontière algéro-nigérienne à pied, après que les forces algériennes les avaient déposé.e.s au Point Zéro à 15km d'Assamaka. Aussi cette fois-ci, les plus grands groupes d'expulsé.e.s étaient 250 Maliens et 195 Guinéen.ne.s. Apart eux il y avaient 6 ressortissant.e.s du Soudan, 18 du Burkina Faso, 29 de la Côte d'Ivoire, 13 de la Sierra Leone, 10 du Caméroun, 9 du Bénin, 26 de la Gambie, 12 du Nigeria, 2 du Niger même, 3 de l'Égypte, une personne du Liberia, une de la Guinée Bissau, une de la Libye, une personne somalienne et une des Komores parmi les expulsé.e.s.

 

Convoi d'expulsion officiel du 22 Mars 2022

Selon les lanceurs d'alerte d'Alarme Phone Sahara à Assamaka, un convoi d'expulsion officiel avec 1111 citoyen.ne.s du Niger, y compris 45 femmes, 42 filles mineures, 32 garcons mineurs et 992 hommes, est arrivé le 22 Mars 2022.


Conditions précaires pour des milliers de personnes expulsées au Niger

A Assamaka

Arrivée d'expulsé.e.s à Assamaka à pied, 8 Mars 2022

Les lanceurs d'alerte d'Alarme Phone Sahara, ainsi que des gens expulsé.e.s qui partagent leurs témoignages, rapportent que les conditions dans le camp d'OIM à Assamaka soient mauvaises et en train de se dégrader. Des gens se pleignent de manque de nourriture et de soins médicaux et de conditions non-hygiéniques. Selon ces témoignages, il y a des gens qui sont resté.e.s sans nourriture pendant des jours. Certain.e.s disent qu'on les a privé de leur liberté de circulation en les interdisant de sortir du camp, ce qui peut être une conséquence d'une application problématique de règlements de confinement à cause de la pandémie de Covid.

En plus, les lanceurs d'alerte d'Alarme Phone Sahara ont rapporté que le camion utilisé par l'OIM pour sécourir les personnes en difficulté entre Point Zéro et Assamaka soit présentement en panne, de facon que les navettes par L'OIM, les organisations humanitaires présentes à Assamaka et les forces de sécurité soient présentement suspendues. Cette situation aggrave le danger pour la vie des personnes expulsées, comme il y a souvent des gens malades, blessé.e.s et affaiblies qui ne sont plus capables de marcher 15 à 20 km de Point Zéro à Assamaka et d'autres qui se perdent en désert et ne retrouvent plus le chemin.

 

 

A Agadez

Des citoyen.ne.s du Niger expulsé.e.s arrivent à Agadez, 10 Mars 2022

©Alarme Phone Sahara

Selon les équippes d'Alarme Phone Sahara, la situation s'aggrave aussi dans des autres villes du Niger, comme à Arlit et à Agadez où il y a des milliers de personnes expulsées qui n'arrivent ni à reprendre leur voyage, ni à retourner dans leurs zones et pays d'origine. D'habitude, les gens expulsé.e.s arrivent à mains vides, comme les forces de sécurité algériennes leur arrachent leur argent, leurs portables et leurs biens personnels. L'OIM et d'autres organisations sur place disent qu'ils soient dépassées par le grand nombre de personnes expulsées qui arrivent au Niger et que d'autre part, le retour de gens non-nigérien.ne.s dans leurs pays d'origine traine à cause d'une manque de coopération des autorités nationales de ces pays.

Selon l'équippe d'Alarme Phone Sahara d'Agadez, il y a maintenant souvent des migrant.e.s expulsé.e.s qui, dans leur misère, vendent des nattes et d'autres objets qu'ils ont recu de la part de l'OIM, parce qu'ils manquent d'autres sources de revenues.

En même temps, il y a d'autres personnes qui évitent de rester dans les camps de l'OIM, parce que leur aide est toujours lié à la condition de se soumettre à leurs programmes de retour soi-disant volontaire.

D'autre part, pour les expulsé.e.s de nationnalité nigérienne, qui sont souvent des ressortissant.e.s des régions les plus appauvries du pays, comme la région de Kantché, le problème se pose que depuis 2020, l'état du Niger ne soutient plus ses propres citoyen.ne.s expulsé.e.s d'Algérie pour retourner dans leurs communautés d'origine respectives.

 

A Dirkou

Même à Dirkou dans le désert au nord du Niger, il y a ce dernier temps de plus en plus de gens expulsé.e.s de la Libye. Selon des accords en place, les autorités libéennes seraient obligées de transporter des expulsé.e.s jusqu'à la ville d'Agadez. Pour ces convois d'expulsions, ils commissionnent des transporteurs privés. Ces-derniers quand même les enmênent souvent seulement jusqu'à l'escale de Dirkou et cherchent à négocier avec d'autres chauffeurs pour les enmener jusqu'à Agadez. En pratique, ca ne marche pas toujours d'une manière fiable, ce qui fait que de plus en plus de gens restent bloqué.e.s à Dirkou.

 

Discrimination dans la misère

Selon l'observation des équippes d'Alarme Phone Sahara, partagée aussi par des chercheur et chercheuses dans le contexte de la migration, dans cette misère générale, il s'ajoutent en plus des pratiques de discrimination dans la gestion de la prise en charge des personnes expulsé.e.s. Un phénomène observé est la discrimination de ressortissant.e.s de pays anglophones par rapport aux ressortissant.e.s des pays francophones.

 

Des femmes et filles ciblées par des réseautages criminels

La situation précaire des personnes expulsé.e.s au Niger crée aussi des conditions de vulnérabilité surtout pour des femmes et des filles, dont certaines sont ciblées par des réseautages criminels de traite d'êtres humains et de prostitution forcée, qui opèrent souvent au niveau transnationale entre la Libye, le Niger, le Nigéria, le Mali et des fois jusqu'en Europe. L'équippe d'Alarme Phone Sahara d'Agadez a suivi le cas d'un group de filles d'origine nigérianne qui étaient contraintes à la prostitution par une femme qui agissait au sein d'un réseautage criminel tant en Libye qu'au Niger. Avec l'aide d'un pasteur elles avaient réussi de s'en sortir et se mettre à l'abri dans une église et l'autrice de ce crime a été arrêté par la police nigérienne.

 

Face à cette situation, Alarme Phone Sahara demande:

⦁ Les expulsions d'Algérie, de la Libye et d'autres pays doivent être arrêtées.

⦁ L'accord d'expulsions entre l'Algérie et le Niger, et tous les accords d'expulsions, doivent être annulés.

⦁ L'OIM doit utiliser ses ressources pour soutenir les personnes expulsées qui le souhaitent vraiement de rentrer vers leurs pays d'origine.

⦁ Le soutien aux migrant.e.s en situation de détresse doit être garanti de manière inconditionnelle et ne doit pas dépendre de la volonté de soi-disant "retour volontaire".

⦁ L'OIM doit veiller à ce que les personnes accueillies dans ses centres bénéficient de conditions de vie décentes, notamment en ce qui concerne l'approvisionnement en nourriture, les soins médicaux, l'hygiène et l'hébergement.

⦁ L'état du Niger doit continuer à soutenir ses citoyen.ne.s qui sont expulsé.e.s d'Algérie et d'autres pays à retourner dans leurs régions et communautés d'origine au lieu de les abandonner dans des conditions de détresse.

⦁ Les pays de la sous-région doivent soutenir leurs citoyen.ne.s qui le souhaitent d'y retourner sans complication.

⦁ Stop aux politiques de l'externalisation des frontières européennes sur le sol africain!

 

Appel au soutien solidaire et indépendant pour les migrant.e.s au Niger

En raison des nombreuses expulsions massives d'Algérie, et plus récemment de Libye, des milliers, et de plus en plus, de personnes sont bloqué.e.s dans les villes du Niger, à mains vides, sans sources de revenues et sans accès, ou sans accès suffisant, à des structures de soutien officielles. Certain.e.s d'entre eux approchent des structures volontaires, comme Alarme Phone Sahara, qui ne disposent quand même pas les resources nécessaires pour satisfier les besoins dans cette misère.

Alarme Phone Sahara appelle à soutenir son travail et celui d'autres organisations indépendantes de la société civile qui apportent une solidarité pratique aux migrants au Niger. L'Alarme Phone Sahara organise une fois par semaine une cuisine collective à Agadez, propose un point d'accueil pour les personnes expulsées à Assamaka, organise des patrouilles pour sauver les personnes en situation de détresse dans la région du Kaouar et à Assamaka et fournit d'autres formes de soutien quotidien.


Pour faire un don à Alarme Phone Sahara, cliquez ici