lundi, 17 janvier 2022
Décembre 2021: Au moins un homme soudanais décédé parmi 3269 personnes expulsées d'Algérie au Niger en décembre 2021

L'anné 2021, marquée par des milliers d'expulsions d'Algérie au Niger chaque mois, se termine avec la mort tragique d'un citoyen soudanais qui est décédé au "point zéro" dans la zone du désert à la frontière algéro-nigérienne proche de la ville d'Assamaka. Selon les lanceurs d'alerte d'Alarme Phone Sahara, le défunt était arrivé au "point zéro" le 8 décembre avec un convoi d'expulsion non-officiel.

 

Tombe d'un homme soudanais qui est décédé à "point zero" / Assamaka

le 8 décembre 2021 après un convoi d'expulsion

 

L'identité et les circonstances exactes de la mort de l'homme soudanais doivent encore être éclaircies. Néanmoins, on peut supposer que les conditions inhumaines et violentes dans lesquelles des migrant.e.s arrêtés sont détenus dans les prisons algériennes, puis transportés sur de longues distances à travers le désert jusqu'à la frontière nigérienne et finalement abandonné.e.s en plein désert dans un état affamé et déshydraté, sont directement responsables de la mort de cet homme.

Régulièrement, les personnes des convois d'expulsion "non-officiels" sont laissées dans la zone frontalière entre l'Algérie et le Niger, en plein désert. Les expulsé.e.s doivent marcher entre 15 et 20 kilomètres dans le désert afin d'atteindre Assamaka, la première ville nigérienne après la frontière algérienne. Avec cette pratique, les forces de sécurité algériennes mettent toujours la vie des expulsé.e.s en danger et il est à craindre que beaucoup plus de personnes n'y arrivent pas si elles se perdent dans le désert.

En décembre 2021, au moins 3269 personnes ont été expulsées d'Algérie au Niger dans 4 convois d'expulsion selon les observations des lanceurs d'alerte d'Alarme Phone Sahara. Avec eux, le nombre de personnes expulsées pendant toute l'année 2021 s'élève à au moins 25396 personnes. A titre de comparaison : En 2020, selon les chiffres d'Alarme Phone Sahara, au moins 22631 personnes ont été expulsées d'Algérie vers le Niger.

 


Convois d'expulsion non-officiels le 8 et le 21 décembre 2021

Selon les observations des lanceurs d'alerte d'Alarme Phone Sahara, 790 personnes expulsées d'Algérie dans un convoi d'expulsion "non-officiel" sont arrivées à pied au poste frontière d'Assamaka le 8 décembre 2021 après que les forces algériennes les avaient déposé.e.s en désert au "point zéro", où un homme soudanais est tragiquement décédé.

Des gens expulsé.e.s d'Algérie à Assamaka, Décembre 2021

 

Dans ce group se trouvaient 6 garcons mineurs et 4 femmes. Les plus grands groupes d'expulsé.e.s étaient les ressortissant.e.s du Mali, au nombre de 190, les ressortissant.e.s de la Guinée Conakry, au nombre de 269 et 120 personnes soudanaises. A côté d'eux, il y avait également des ressortissant.e.s de nombreux autres pays d'Afrique subsaharienne: 26 du Togo, 14 de Sierra Leone, 39 de la Côte d'Ivoire, 16 du Cameroun, 29 du Bénin, 12 du Sénégal, 36 du Burkina Faso, 7 du Nigeria, 3 du Ghana, 10 du Tchad, 18 de la Gambie et une personne du Liberia.

Un autre 603 personnes expulsées en convoi "non-officiel", dont deux femmes, sont arrivées à pied à Assamaka le 21 décembre 2021. Les plus grands groupes cette fois étaient 207 Malien.ne.s, 197 ressortissant.e.s de la Guinée Conakry et 61 personnes soudanaises. Apart eux, 10 personnes de la Sierra Leone, 22 de la Côte d'Ivoire, 19 du Cameroun, 10 du Bénin, 34 du Burkina Faso, 11 du Nigeria, 9 du Tchad, 10 de la Gambie, 5 du Congo, deux du Ghana, deux du Libéria, une personne du Sénégal, une de la Guinée Bissau, une de l'Éritrée, et une personne du Togo étaient dans le convoi.

 


Convois d'expulsion officiels le 10 et le 23 décembre 2021

Selon les lanceurs d'alerte d'Alarme Phone Sahara, 1067 personnes expulsées d'Algérie vers le Niger dans un grand convoi officiel sont arrivées à Assamaka le 10 décembre 2021. Parmi elles se trouvaient 89 filles mineures, 70 femmes, 95 garçons mineurs et 813 hommes.

Des gens expulsé.e.s d'Algérie à Assamaka, Décembre 2021

 

Un autre 809 personnes expulsées dans un convoi officiel sont arrivées à Assamaka le 23 décembre 2021. Parmi elles 80 filles mineures, 46 femmes, 95 garçons mineurs et 588 hommes.

Là encore, les chiffres élevées de une fois 184 et l'autre fois 175 enfants mineurs parmi les personnes expulsées sont inquiétants, étant donné que des cas de maltraitance et de séparation d'enfants de leurs parents sont régulièrement signalés dans les convois d'expulsion d'Algérie vers le Niger.

 


L'état Algérien et sa politique de chasse aux migrant-e-s

L'année 2021 se termine avec un bilan triste et révoltant d'expulsions violentes, extra-légales et aux pire des cas meurtrières d'Algérie au Niger.

En fait, depuis des annés, il y avait plusieurs phases d'expulsions massives d'Algérie vers le Niger et le Mali. Les vagues de raffles, d'arrestations et d'expulsions depuis Septembre 2020 sont un résultat direct de la "réforme migratoire" et de la création d'une commission interministérielle pour lutter contre la "migration irrégulière", annoncée par le ministre algérien de l'intérieur Kamel Beldjoud lors d'une session plénière du parlement le 30 septembre 2020.

Les "mesures complémentaires" annoncées par le ministre comptent des barrages mixtes entre la police et la gendarmerie sur les routes frontalières, la démolition des "habitations anarchiques" abritant des migrant-e-s, comme des hangars ou des chantiers de construction, le démantèlement des réseaux d'accueil de migrant-e-s ainsi que la confiscation automatique de moyens de transport.
D'un part, cette sorte de déclaration de guerre contre les migrant-e-s en Algérie suit l'intérêt des autorités algériennes de réduire le nombre de migrant-e-s et de satisfaire le racisme au sein de la société autochtone. D'autre part, c'est une chance pour eux de se positionner comme des gardien pour le régime frontalier des états de l’Union Européenne. Bien que l'état algérien a refusé jusqu'à maintenant de signer un accord officiel sur les migrations avec les pays de l'UE, sa politique d'expulsion impitoyable le sert comme atout dans les négociations avec les états européens sur les crédits et les coopérations économiques.

En plus, la collaboration existe déjà sous forme de livraisons de grandes quantités de marchandises militaires et sécuritaires pour l'armée, la police et la gendarmerie algérienne, comme des technologies de surveillance ou des véhicules de Mercedes-Benz.

 


Accords d'expulsions et externalisation des frontières

Les expulsions officiels d'Algérie au Niger se passent à la base d'un accord bilatéral signé en 2014 pour l'expulsion de ressortissant.e.s du Niger, dont beaucoup vivent en Algérie dans un contexte de migration souvent saisonnière. Quand même, l'état algérien en profite aussi pour expulser des nombreux.ses ressortissant.e.s d'autres pays surtout de l'Afrique Subsaharienne dans des convois "non-officiels", et jusqu'à maintenant les autorités du Niger manquent la puissance ou la volonté de stopper cette pratique.

Il faut aussi voir les expulsions d'Algérie au Niger et les violantions des droits humains par les forces de sécurité algériennes dans le contexte de la politique d'externalisation des frontières par les pays de l'Union Européenne, qui entretiennent des accords avec le Niger pour aider à fermer les trajets de migration et qui collaborent aussi avec l'Algérie, entre autres sous forme de délivrance de grandes capacités de véhicules militaires et de technologie "sécuritaire".

 


Face à ce bilan de l'an 2021, Alarme Phone Sahara demande:

⦁ Faire la lumière sur les circonstances de la mort de l'homme soudanais arrivé le 8 décembre 2021 par un convoi d'expulsion non officiel au "point zéro" près de la frontière algéro-nigérienne, où il est décédé dans le désert.

⦁ Alarme Phone Sahara continue à demander la vérité et la clarification de la part l'Etat algérien sur ce qui s'est réellement passé dans les convoi d'expulsions qui ont quitté Alger le 12 et le 25 mars 2021, en particulier s'il est vrai que des personnes ont été tuées dans des accidents de bus!

⦁ L'arrêt immédiat des expulsions et des refoulements de réfugié-e-s et de migrant-e-s de l'Algérie vers le Niger et d'autres pays voisins!

⦁ L'annulation de l'accord d'expulsion entre l'Algérie et le Niger!

⦁ L'arrêt immédiat des expulsions d'enfants et de la séparation d'enfants de leur parents!

⦁ La fin des actes de vol et de violence des forces de sécurité algériennes contre les migrant.e.s et les réfugié.e.s!

⦁ L'engagement de l'état du Niger pour la défense de ses citoyen.e.s qui subissent des persécutions, des violations des droits humains et des expulsions en Algérie!

⦁ L'Algérie et le Niger doivent arrêter de collaborer avec les politiques de l'externalisation des frontières européennes sur le sol africain et de prendre des matériels de militaire et de sécurité pour les utiliser contre la population migrante!